En mémoire du chevalier de La Barre
Le chevalier de La Barre fut torturé et brûlé comme « impie, blasphémateur et sacrilège exécrable ». Ne l'oublions pas face à tous ceux qui veulent rétablir un "délit de blasphème" et limiter la liberté d'expression en matière religieuse.
Jean-François Chanet nous relate avec la plus grande rigueur la vie et la condamnation du chevalier de La Barre. Jean-François Chanet est historien, professeur des universités à l'Institut d'études politiques de Paris, ancien recteur, vice-président de la Société d'études jaurésiennes et de la Ligue de l'enseignement, qui a notamment publié "L'École républicaine et les petites patries" (Aubier, 1996) et "Clemenceau. Dans le chaudron des passions républicaines" (Gallimard, 2021), a présenté (le 7 avril) son analyse de l’histoire du chevalier de La Barre. Il a développé cette analyse dans une étude que nous publions intégralement avec son aimable autorisation :
Désigner du nom de « martyre » le sort du chevalier de La Barre ne pouvait le faire apparaître que comme une inversion, insupportable dans la France moderne, de celui des premiers chrétiens. Il suffit pour s’en convaincre de penser à l’entrée « Martyrs » du Dictionnaire des idées reçues de Flaubert. On sait ce que doit à Voltaire la transfiguration d’un jeune homme de dix-neuf ans, condamné à mort, torturé et supplicié pour blasphème en 1766, en symbole de l’arbitraire d’une justice assujettie au zèle dévot. Entre tous ses défenseurs posthumes, Voltaire a fait du chevalier de La Barre le héros malgré lui de la résistance au fanatisme et à la superstition. À 72 ans, il a engagé le combat pour la justice contre ses accusateurs et ses juges. Sans ce combat, dont le Grand Dictionnaire universel du XIXe siècle de Pierre Larousse a amplifié l’écho, l’idée ne serait probablement pas venue aux libres penseurs d’honorer la mémoire du chevalier au temps du Bloc des gauches et de la statuomanie…
Texte intégral dans l'édition "Laïcité" de la Ligue de l'enseignement.